Temps de lecture : 3 min
Les études de consommateurs dites « ethnographiques », c’est à dire en immersion réelle au domicile des consommateurs, sont plébiscitées pour avant tout éviter les biais de fausses déclarations. Car oui nous sommes tous pareils, entre ce que l’on déclare et ce que l’ont fait, entre nos intentions et nos actes, il y a souvent de véritables écarts. En matière d’alimentation, nous ne sommes pas au dernier paradoxe près… Zoom sur 3 exemples symptomatiques !
Authenticité vs Instagram
Une tendance de fond en matière alimentaire est le retour à l’authenticité, au vrai. Vrai goût des aliments, vrais producteurs, vrais ingrédients… On rejette les colorants, les arômes, les additifs, on veut du V.R.A.I. et on veut que ça se voie. La transparence s’impose partout : les cuisines ouvertes dans les restaurants, les ateliers dans les boulangeries, les packagings transparents… On ne veut plus de « chichis » !
Mais la déferlante « Instagram », le réseau social star à plus d’un milliard d’abonnés, n’en finit pas de déverser ses flots de photos parfaites toujours plus artificielles et idéalisées. En matière de food, c’est un peu petit peu comme quand on va chez Mcdo ou Burger King : on adore fantasmer sur le visuel alléchant du sandwich parfait mais on sait pertinemment qu’on n’aura absolument pas cela dans la réalité !
Et oui, on adore le vrai mais on passe son temps à se mettre en scène. Pas simple !
Instafood (studio bagel)
Snacking vs Surremballage
Les modes de consommations évoluent de plus en plus vers une destructuration progressive des repas.
Même si en France, ce modèle tend plutôt à bien résister par rapport aux pays anglo-saxons, nous connaissons nous aussi la montée du « nomadisme » et de la consommation dite de snacking. Qu’elle remplace les repas traditionnels ou qu’il s’agisse d’une simple collation entre deux repas, elle entraîne le développement d’une offre de produits adaptés à cette nouvelle mobilité des repas vendus souvent à l’unité ou dans des conditionnements pratiques à emporter : c’est l’explosion des offres en emballages individuels.
Si nous en sommes si friands c’est que la portion individuelle peut aussi être considérée comme une réponse au gaspillage en rationnant les quantités, voire même une réponse à un moyen de contrôle sur les quantités consommées… pas simple ! Enfin, l’enjeu de la sécurité sanitaire peut également se heurter au développement d’une nouvelle offre en vrac, sans emballage.
Mais, conséquence de tout cela, les aliments que nous consommons deviennent de plus en plus emballés, conditionnés unitairement, avec des solutions de plats et de couverts en plastique à emporter partout. Et cela en totale contradiction avec la tendance de réduction des emballages !
Nous prenons massivement conscience de l’impact des déchets plastiques sur notre environnement et des initiatives pointent le jour : bien entendu la fin de la distribution des pochettes plastiques dans les supermarchés mais aussi les achats en vrac. Là encore, pas si simple d’arbitrer.
Qualité vs Prix
Quand on nous interroge en tant que consommateurs, c’est bien simple nous voulons tout ! Plus de local, plus de rémunération pour les producteurs, plus de qualité, plus de made in France, plus, plus, plus… Alors qu’en réalité nous savons aussi qu’un des critères les plus importants à l’achat de nos jours reste le prix, même si une part croissante de la population (et c’est une très bonne chose) se dit prête à payer plus pour des produits de meilleur qualité. Nous voulons tout et pensons que tout cela peut bien finir par rentrer dans un tout petit prix.
En plus, nos distributeurs nous le font croire ! Par exemple, Lidl — « le vrai prix des bonnes choses » — ou encore Leclerc avec « C’est qui le moins cher . com ? ». Des années de communication sur les prix nous ont éduqués à arbitrer via les prix et c’est devenu le positionnement et le combat de toutes les enseignes.
Nous avons un peu oublié au passage que cette qualité que nous plébiscitons a un coût et donc un prix ! Nous avons perdu la vraie valeur des choses. Nous avons oublié que des produits « made in France » restent plus chers car déjà en France on ne travaille pas pour rien. En France, la réglementation qui s’impose aux entreprises, producteurs, artisans et extrêmement exigeante et cela engendre des coûts.
Finalement, la société nous impose d’être parfaits, de bons citoyens, responsables et exemplaires et nous jugeons tous à travers ce prisme en portant un regard ultra exigeant sur le monde qui nous entoure. Les réseaux sociaux deviennent une caisse de raisonnance massive de nos multiples indignations sur le monde qui nous entoure. Mais nous oublions parfois notre petites contradictions, nos petites faiblesses qui nous rendent terriblement humains mais qui parfois devraient nous mettre en garde contre des jugements un peu trop hâtifs.