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En grandes difficultés, Starbucks, l’enseigne star et pionnière des coffee shops annonce un changement « radical » à venir.
Instagram Starbucks
À nombre comparable de boutiques dans le monde, la chute de son chiffre d’affaires est de 7%. Son bénéfice net est même en chute libre de 25,4%. « Il est clair que nous devons changer notre stratégie de manière radicale pour attirer de nouveau les consommateurs », a commenté M. Niccol, aux commandes de Starbucks depuis le 9 septembre. « Mon expérience me laisse à penser que lorsque nous retrouverons notre identité d’origine et que nous fournirons une expérience formidable de manière pérenne, nos consommateurs reviendront », a poursuivi M. Niccol.
Le leader du segment des coffee shops est en crise partout, y compris en France, où malgré un nombre de points de vente en progression de 25%, son chiffre d’affaires est en recul de 8%.
Si Starbucks a réussi à su se faire une place dans le paysage de la QSR (Quick Service Restauration), son modèle est en crise (source : Food Strategy & Performance)
Pourtant, selon Le Monde, le modèle des coffee shops aurait le vent en poupe. « C’est le segment le plus dynamique de la restauration et le plus ouvert aux nouveaux entrants grâce à une barrière à l’entrée moins forte en termes d’investissement », analyse Michael Ballay, directeur associé de Food Service Vision dans le quotidien. Initié par le pionnier Starbucks, le format se développe via des offres concurrentes très actives, comme en France Columbus Café mais aussi par une nuée de néo cafés indépendants et de chaînes étrangères qui s’emparent des facteurs clés de succès de ce format. C’est sans compter aussi la concurrence des boulangeries traditionnelles comme Feuillette ou encore la restauration rapide qui s’y intéressent de prêt.
Infographie : Le Monde – Sources : Kantar Worldpanel 2024, Food Service Vision
En attendant que le pionnier du coffee Shop trouve la formule pour relancer son business, la tendance portée par cet univers de consommation n’en finit pas de se diffuser.
L’univers du coffee shop inspire en premier lieu des offres de produits dédiés à cet univers , comme les laits végétaux Alpro « Barista » mais aussi les laits d’avoine Oat-ly! En choisissant de se positionner au coeur de cet univers de consommation, ces deux marques ancrent leur stratégie autour de la végétalisation dans un univers moderne et associé aux plaisirs. On peut également noter la gamme Barista de chez Monin pour réaliser des boissons chaudes ou froides toujours plus créatives.
« Au sein de la Collection Barista de Monin, la création du mois est le chocolat Chaud Roulé à la Cannelle »
L’univers Barista inspire également les recettes de produits alimentaires. On peut citer par exemple, la gamme de Cafés Latte de Lactel ou encore la gamme de spécialités Barista signée Columbus x Candia. La marque Rians (Triballat) signe de son côté une « collection Barista » avec des desserts au chocolat et café frappés.
Rians lance une collection de desserts « Barista »
On ne compte plus les déclinaisons cappucino ou matcha dans de nombreuses recettes de cookies ou de desserts. Les déclinaisons épicées autour des Chaï Latte ou encore des « pumpkin spice » ouvrent des voies à des nouvelles associations de goût créatives qui se diffusent dans des recettes sur les réseaux sociaux mais aussi dans des formulations de produits.
Matcha latte, chaï tea, pumpkin spice latte, egg coffee, tiramisu au matcha, cinnamon rolls… Ce livre promet de « découvrir plus de 35 recettes de boissons chaudes et de pâtisseries ultra-réconfortantes pour des journées cocooning bien au chaud »
Autre exemple avec Chérico. La jeune startup entend bien faire opérer une véritable cure de jouvence à la chicorée de mamie en s’appuyant, entre autre, sur l’univers du coffee shop pour y distribuer ses produits, mais aussi y promouvoir de nouvelles associations autour de cette boisson iconique.
« Barista mania »
« On a pas besoin d’un barista pour réussir son cold brew » (le cold brew est une méthode douce d’extraction du café à froid. Elle fait partie des six méthodes principales du slow coffee, ndlr) annonce Nestlé Dolce Gusto dans cette pub TV. La marque promet ainsi une machine qui permettrait d’avoir un « coffee shop à la maison ».
Les marques misent ainsi sur l’association avec un univers chaleureux, synonyme d’expériences, de petits plaisirs et de convivialité. C’est aussi un univers particulièrement prisé des plus jeunes, un univers moderne avec des créations audacieuses en matière de boissons (on ne compte plus les déclinaisons chaudes ou froides à partir du café, du thé ou encore du chocolat), mais aussi de pâtisseries et autres produits de snacking salés.
Cheesecake au fruit du dragon chez Starbucks.
Série limitée « Frappuccino Licorne » chez Starbucks.
La personnalisation est au coeur de l’offre du coffee shop
Le coffee shop à la française : « Ne gardez que le meilleur des US »
Mais cet univers inspire également de nouveaux récits, comme avec cette campagne de Colombus Café qui célèbre en miroir son savoir-faire à la française. L’enseigne signe même une exécution en partenariat avec Bleu Blanc Coeur repositionnant un peu plus encore le concept venu des US au cœur de notre culture française. Malin.
« Columbus s’associe avec Bleu Blanc Coeur et promet « ne gardez que le meilleur des U.S. »
Par ailleurs, le plus français des coffee shops développe sa présence dans la grande distribution en s’associant à des industriels pour la fabrication de pâtes à tartiner (via Nutrimaine), boissons (via Candia), muffins et divers toppings (via Sainte Lucie) pour réaliser des gâteaux comme le relate Kelly Flandrin sur son compte Linkedin :
Linkedin de Kelly Flandrin
Le coffee shop à la française inspire aussi du côté des chaînes de boulangeries avec l’exemple du concept du Café Feuillette inauguré à Tours il y a quelques semaines. Ce nouveau format de boutiques ambitionne d’être la version française du coffee shop.
« Le Café Feuillette. La version française du coffee shop imaginée par le bouillonnant boulanger-pâtissier » par France Snacking
Les facteurs clés de succès
J’ai donc demandé à Rémi Héluin, consultant et journaliste spécialisé en boulangerie pâtisserie, les facteurs clés de succès de ce modèle du Coffee shop.
Les coffee shops ont une avenue devant eux parce que les grandes marques internationales représentent l’exact inverse de ce besoin de proximité et de personnalisation, qui s’amplifie dans des périodes de crise (ou de permacrise désormais…) telles que celle que nous vivons.
Selon lui, « le succès de la « nouvelle génération » de coffee shops tient principalement en leur capacité à rassembler des offres liquide et solide qualitatives dans un même lieu. Si la culture autour du café tend à se répandre en France, on ne conçoit pas de ne pas pouvoir consommer un en-cas salé ou sucré dans ce genre de lieu. Il y a quelques pionniers du genre qui l’ont compris très tôt, comme Tom Clark, le fondateur de Coutume Café, qui a amendé sa vision à l’Australienne du coffee shop pour s’ouvrir à un plus large public. C’est d’ailleurs une opportunité dont se saisissent de plus en plus de boulangers, parce qu’ils sont légitimes (et compétents) sur les produits, tels que les cakes, les sandwiches … Il « suffit » d’y ajouter des éléments d’éthique/de qualité sur l’approvisionnement du café et la recette est assez redoutable et différenciante (même si beaucoup vendent encore du Nespresso !) ».
L’autre pilier de ce succès, poursuit-il « c’est la capacité à créer des lieux de vie chaleureux, à l’image de leurs quartiers et des gens qui y habitent/travaillent. On vient non seulement chercher une boisson chaude et une gourmandise, mais un bon moment, aussi bien grâce au décor qu’au service ».
Quand Starbucks inspire McDonalds
Alors que le pionnier Starbucks est condamné à se réinventer, notons peut-être une forme d’ultime influence sur CosMc’s, le nouveau concept de McDonald’s venu une nouvelle fois des US. Cette nouvelle chaîne, qui veut se positionner sur le même segment que Starbucks, annonçait il y a quelques mois l’ouverture d’une dizaine de sites pilotes CosMc d’ici la fin de 2024 dans les régions métropolitaines de Dallas-Fort Worth et de San Antonio au Texas.
Et si le McCafé avait du souci à se faire ?