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Dans cette nouvelle série « 5 questions pour nourrir l’avenir », je reçois des personnalités qui nous partagent leur vision dans des entretiens à la fois courts et éclairants.

Hermine Chombart de Lauwe est déléguée générale du CNRA (Conseil National pour la Résilience Alimentaire), qu’elle a cofondé il y a 5 ans, après une carrière dans la logistique et le transport international. Pour cette mère de 4 enfants, l’alimentation et son lien avec l’agriculture sont au cœur des plus grands enjeux sociétaux. Elle en appelle à dépasser postures et clivages via une approche plus systémique et avant tout humaine, afin de répondre aux enjeux de transformation et garantir ainsi les fondements de notre sécurité alimentaire.
Quel regard portes-tu sur le monde d’aujourd’hui ?
Nous sommes à un point de bascule. Les structures établies depuis des décennies, notamment en agriculture et alimentation, évoluent en profondeur. Nous sommes dans une période de frémissement où les marges bougent. C’est un peu à l’image de la fameuse nuée d’oiseaux qu’Olivier Hamant utilise pour parler du concept de « robustesse », où l’on observe que ceux qui changent de direction sont ceux situés à la périphérie. Une multitude d’acteurs sont en train de faire évoluer les choses et cela me rend très optimiste.

Les murmurations sont un phénomène de rassemblement qui se produit lorsque plusieurs centaines, voire plusieurs milliers d’oiseaux forment un incroyable nuage opaque dans le ciel.
Quel est, selon toi, l’enjeu des enjeux en matière d’agriculture et d’alimentation ?
La radicalisation des débats en agriculture et en alimentation empêche tout dialogue. Rapprocher et reconnecter les extrêmes pour en finir avec les effets de posture me semble donc essentiel. Nous devons remettre de l’humain dans nos relations et prendre le temps de nous parler afin de nous comprendre, plutôt que de s’affronter sur de simples mots. Il faut aussi veiller à considérer toujours les choses de façon systémique.
Peux-tu nous partager un signal faible (signe avant-coureur de changements majeurs potentiel) porteur d’avenir ?
En réponse aux enjeux de souveraineté ou de sécurité alimentaire, il y a de plus en plus d’acteurs qui contribuent à relocaliser le « milieu de chaîne », soit les activités de transformation (industrielle ou artisanale), de logistique, de stockage… et témoignent ainsi d’une vision systémique.
Quel est le levier le plus efficace pour faire évoluer nos comportements de consommateur ?
Il faut valoriser les bénéfices à agir, plutôt que les risques à ne pas le faire. Ainsi, faire davantage le lien entre alimentation et santé (au sens de la santé globale, physique et mentale) est un levier ultra puissant et encore largement sous-estimé.
Quelle tendance a selon toi le plus d’avenir ?
La réartisanalisation, ou le retour à des micro-usines locales adaptées à la taille de bassins de consommation spécifiques. Cela renforce clairement les chaînes de valeur locales et la résilience territoriale.
Une initiative remarquable ? Les Journées Nationales de l’Agriculture qui ont pour objectif de faire revenir les populations dans les fermes et qui sont organisées par AgriDemain.
Une innovation qui change la donne ? RESAN propose un nouveau modèle d’industrie agroalimentaire qui crée des chaînes de valeur plus courtes et résilientes grâce à une implantation au plus proche des bassins de production et de consommation. Ils ont développé des conteneurs maritimes installés chez des agriculteurs pour faciliter la transformation de la production à la ferme et la distribuer dans les circuits courts voisins.
Une personnalité inspirante ? François Gemenne, pour sa capacité à nous inviter à changer de lunettes, à transformer les récits anxiogènes en opportunités positives et à encourager l’action.
