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Dans cette nouvelle série « 5 questions pour nourrir l’avenir », je reçois des personnalités qui nous partagent leur vision dans des entretiens à la fois courts et éclairants.
Avec plus de 30 ans d’expérience en marketing et direction générale, notamment chez MARS, INVIVO et SAVEOL, Hélène Guido Halphen accompagne aujourd’hui les acteurs du secteur agroalimentaire à travers du conseil et du coaching de dirigeants et de leurs équipes. Elle est également business angel. Positionnée à l’intersection des enjeux agricoles et alimentaires, elle plaide pour plus de pédagogie, de transparence et de coopération dans un contexte marqué par la défiance des consommateurs. Selon elle, les transformations générationnelles en cours dans les modes de consommation auront un impact profond sur le secteur et doivent être davantage anticipées. Quant à la valeur, si on évoque souvent son partage, faut-il d’abord, selon elle, la créer.
Quel regard portes-tu sur le monde d’aujourd’hui ?
Un regard perplexe et interrogateur. Nous évoluons dans un environnement marqué par de nombreuses contraintes, où il devient de plus en plus difficile de trouver sa juste place, que ce soit individuellement, collectivement ou générationnellement. Dans un contexte aussi complexe, l’enjeu est de retrouver un optimisme réaliste
Selon toi, quel est le plus grand défi pour l’alimentation et l’agriculture ?
On parle souvent du partage de la valeur, mais avant cela, il faut d’abord la créer. Il est essentiel de s’intéresser au les attentes des consommateurs / utilisateurs finaux pour générer de la valeur. Écouter les utilisateurs, comprendre leurs besoins – même ceux qu’ils n’expriment pas encore –, c’est la clé pour bâtir un modèle plus efficace et plus juste, générateur de valeur pour chaque contributeur de la chaîne alimentaire.
Quel signal faible as-tu observé qui pourrait tout changer ?
Les bascules générationnelles dans la consommation. Sur des produits comme les boissons alcoolisées, la viande ou encore le lait, les consommations sont à la peine et on observe un écart de plus en plus marqué entre les habitudes des anciennes générations et celles des plus jeunes. Certains secteurs ne prennent pas encore suffisamment en compte cette mutation profonde.
Source : statista 2024
Quel est, selon toi, le levier le plus efficace pour faire évoluer nos comportements ?
L’information, la pédagogie et l’éducation. Nous sommes dans une époque où il est de plus en plus difficile de cerner qu’est-ce qui est bon ou mauvais ? Qu’est-ce qui est vrai ou faux ? Il faut s’appuyer sur des bases scientifiques solides et s’assurer que l’information soit accessible et compréhensible pour tous. La transparence est également importante pour rétablir la confiance entre consommateurs, marques et plus généralement toutes les institutions.
Comment lutter contre la défiance qui s’installe dans notre société ?
Aujourd’hui, la défiance est partout : envers les politiques, les médias, les entreprises… Cette méfiance généralisée empêche toute transformation positive. Personnellement, il me semble clé d’entretenir, voire recréer du dialogue et de la proximité? Ouvrir les usines, les exploitations, favoriser l’échange. C’est en allant vers l’autre que l’on restaure la confiance. Mais chaque scandale – comme celui de Nestlé récemment – fragilise cet équilibre et donne l’impression que les entreprises font n’importe quoi. Dommage !
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Quelle entreprise ou modèle économique, selon toi, change vraiment la donne ?
Plus qu’une entreprise, je dirais un modèle : la coopération. L’ONU a déclaré l’année 2025, l’année des coopératives, et c’est une belle occasion de (re)-découvrir ce modèle. Dans le monde agricole, mais aussi dans d’autres secteurs, travailler collectivement, partager les décisions et la valeur permet de créer un modèle plus résilient et plus juste.
Une innovation particulièrement remarquable ?
Plus qu’une innovation produit, c’est sur l’excellence de l’exécution de ces innovation qui me semble intéressante à souligner.. De nombreuses innovations échouent parce qu’elles ne rencontrent pas leur marché. D’autres font au contraire d’incroyables succès… grâce ce à une attention portée à la cohérence de l’exécution. À ce titre, Brets est un bon exemple. Cette marque bretonne a su se démarquer par son audace, son inventivité et sa proximité avec les consommateurs.
Une personnalité inspirante ?
Simon Sinek. Sa vision du « Why first » – comprendre le pourquoi on fait les choses avant de s’intéresser au comment et au quoi – est puissant. Aujourd’hui, donner du sens à ses engagements, c’est clé et il a su théoriser cette approche de manière simple et puissante.