Temps de lecture : 7 min
Food & Fashion sont deux secteurs pouvant sembler éloignés, qui sont toutefois tous deux animés par un cœur commun : le plaisir !
Je vous invite en 3 épisodes à répondre à cette question : comment, par une approche en regards croisés, identifier les impasses et les pistes inspirantes de part et d’autre pour plus de durabilité (plus responsable, mais aussi plus désirable) ?
Julie Bigot
1er volet de la série :
2ème volet de la série :
# 3 – LECON DE SEDUCTION : DESIRABILITE & FIDELISATION !
Et si la Mode avait une leçon de séduction à offrir à la food ?
Digitalisation, lien avec son consommateur, fidélisation, expérience en magasin…
Bien contrainte par la concurrence ultra développée, la guerre des prix et la standardisation des produits textiles, la mode a dû apprendre à développer la désirabilité de ses offres et marques.
Des pistes inspirantes pour la Food ?
Pour commencer, la fidélisation :
La fidélisation a beaucoup contribué à la croissance du secteur depuis les années 2000. Elle est devenue un levier de maintien de l’activité et de développement post crise 2008, en s’intéressant aux attentes de ses clients de façon qualitative et en exploitant quantitativement les données permettant d’analyser les comportements d’achat et d’apporter la réponse adaptée aux différents profils clients. Outil de personnalisation elle permet de renforcer l’attachement à la marque et est de plus un formidable levier de trafic !
Au-delà du cumul de point pour obtenir des remises, qui est en place également en GMS, les marques textiles font preuve de créativité pour construire un lien fort et pérenne avec leurs clients. En plus d’avantages transactionnels, des services pour faciliter la vie, des attentions et cadeaux pour de plus en plus personnaliser le lien.
Pour exemple : le programme la grande tribu petit bateau : adapté à chaque étape de la vie des enfants il propose des astuces, des idées pour accompagner parents et enfants.
petit-bateau // la-grande-tribu
Ou encore, dans un secteur proche de la mode, l’univers cosmétique avec Sephora dont le programme de fidélité « communautaire » est l’un des plus efficace.
La marque propose un programme par palier qui ouvre à des avantages toujours plus importants lorsque l’on passe dans la catégorie supérieure, donc lorsque l’on dépense plus chez Sephora. Ainsi vous êtes d’abord white, puis black et enfin Gold en fonction des points accumulés sur une année.
Mais au-delà d’adhérer à un programme de fidélité, la promesse Sephora est d’intégrer une communauté avec laquelle partager des idées, échanger. Les membres peuvent converser entre eux, participer à des évènements exclusifs, trouver des inspirations etc..
Grâce à ce type de plateforme, la marque obtient de nombreuses informations sur ses clients, les connaissant mieux, elle peut orienter ses développements produits et adapter ses propositions en fonction de leurs attentes.
L’écoute et la compréhension des clients est un atout clef pour les fidéliser et devenir désirable.
Bien sûr il faut adapter son programme à ses valeurs, ainsi Body shop propose grâce à ses points fidélité de faire un don pour contribuer à la sauvegarde des animaux.
La démarche de fidélisation peut ne pas être qu’une démarche poussant à la consommation, elle peut servir une vision plus durable et devient alors un moyen de s’engager en tant que consommateur.
Poussé à l’extrême cela peut se traduire par une offre d’abonnement, système que l’on voit fleurir sur de nombreux secteurs essentiellement avec une consommation quotidienne comme l’alimentaire. C’est la base du système des AMAP, développer également par des démarches engagées, comme :
- La fourche et son système d’abonnement à des produits bio à prix accessibles, grâce à une entreprise engagée dans le mieux manger pour tous :
La Fourche propose à ses clients de contribuer au développement de la marque au travers de co-création de produits meilleur rapport Q/P. Un abonnement qui engage et créé un lien fort entre la marque et ses adhérents.
- Ou Poiscaille et ses pêcheurs, pour une pêche en circuit court à laquelle le consommateur peut également apporter son soutien financier. Le pont entre consommation, financement et engagement est largement franchi.
Ces idées d’abonnements inspirent également les marques à la consommation moins quotidienne, créant d’autres liens et modifiant le rapport à la propriété en profondeur, l’exemple le plus marquant : le modèle de location en abonnement chez DECATHLON.
Vous pouvez également louer votre matériel de camping pour une saison plutôt que d’acheter un équipement qui dormira dans votre cave toute l’année.
Autant de nouveaux modèles qui répondent aux attentes des consommateurs et à la nécessaire réinvention des usages pour s’adapter aux attentes consommateurs, à l’inflation et faire face aux enjeux climatiques.
En fashion c’est bien sur la 2nde main portée par Vinted qui se place en 14ème position en valeur juste derrière la Halle et 15ème en volume sur le marché textile chaussure et accessoires en 2021 (Source Kantar marche textile chaussure accessoire – Total distribution – 2021).
En parallèle et pour permettre ces évolutions s’est développée la digitalisation des marques / enseignes textiles, celles ayant su prendre ce virage s’en sortent le mieux :
Attention toutefois à ne pas confondre le digital comme fin en soi, qui n’apporte que peu d’intérêt et le digital en tant qu’outil, moyen qui apporte des services facilitateurs du quotidien. Une étude sur le e-commerce en 2022 met l’accent sur ce décalage entre les développements digitaux proposés (ou prévus) par les entreprises et les attentes réelles des consommateurs qui veulent avant tout une navigation simple et fluide (65%), un attrait visuel (50%) et un design simplifié (45%).
Etude Storyblock – the state of e-commerce 2023 // marketing et conso pas sur la même longueur d’ondes.
E-commerce : les marques ont encore du mal à cerner leurs clients | Comarketing-News
C’est bien ce dernier qui a permis une progression dans la mode (et une survie pendant la crise covid). Les ventes en ligne représentent en moyenne 20% du CA des enseignes, les magasins restant donc bien les premiers lieux d’achat mais différemment ! le digital y joue également un rôle.
Parmi ces services : le click & collect pour récupérer une commande achetée en ligne directement en magasin, la e-réservation qui elle permet de faire mettre de côté une ou plusieurs pièces sans les payer pour être sur de les avoir en magasins pour pouvoir les essayer lors de sa venue. Autant de leviers en forte croissance pour la food : livraison à domicile (+87% versus 2021) et drive (+31%) soit un total des ventes E-commerce en progression de +34% (Kantar Marché agro-alimentaire tendances 2022).
La progression de la livraison à domicile de plats frais préparés, des drive piétons en grosses agglomérations sont des signes d’évolution forte des attentes consommateurs ! Un virage à ne pas rater (au risque d’une fin tragique). Ces leviers pouvant être développés sous un angle de durabilité (moins de déplacements inutiles, plus de proximité, de local, moins de gaspillage).
Pour les années à venir, l’expérience en magasin fera la différence, le retour au commerce physique est en pleine progression à condition d’y trouver des services que l’on ne trouve pas en ligne comme des rendez-vous personnalisés de coaching looks proposés même dans des enseignes accessibles (Promod, grain de malice ou Bréal) qui pourraient se transposer en alimentaire en coaching cuisine rapide, saine et pas chère, ou batchcooking.
L’un des meilleurs exemples de la distribution étant Leroy Merlin qui organise des ateliers bricolage pour apprendre à poser son carrelage, sa moquette etc.
Et de nombreux tutos pour réparer, comprendre le fonctionnement de ses outils, pour l’intérieur ou l’extérieur… un exemple de saison : la tondeuse
leroymerlin.fr//comment-diagnostiquer-et-reparer-une-tondeuse-qui-ne-demarre-pas
Bien sûr le contenu et les services proposés par la marque ou l’enseigne sont essentiels mais le lien et la désirabilité de l’expérience magasin passe avant tout par les équipes ! La profession de vendeur en distribution a grand besoin d’une revalorisation, elle est clef pour le commerce physique de demain. Les équipes magasin doivent pouvoir informer, accompagner tant sur la sélection produit, qu’en aidant chacun à affiner sa démarche qu’elle soit orientée santé, anti-gaspi ou autre. Ce constat d’une dévalorisation des métiers de la vente est malheureusement commun à tous les secteurs de la distribution.
L’alimentaire est devenu « fashion » ! Instagram regorge d’images de mode et de Food !! Les restaurants cherchent la dimension instagramable de leurs plats et pas seulement la composition et le goût.
Travail de couleurs, textures… Une opportunité de désirabilité qui n’exclue pas l’engagement ! Quand consommer Mieux rime avec Plaisir, le bonheur dans la frugalité, la simplicité par le goût !
Valrhona met en avant les réalisations de ses clients :
Funky veggie chouchoute ses abonnés et partage l’avis de ses haters:
Bjorg travaille l’influence, et fait participer ces followers à des concours
Marcel Bio valorise ses producteurs locaux et partage des idées recettes
La mode a toujours été très liée à la notion d’image, une marque de prêt à porter vend autant une image, un univers, une incarnation qu’un vêtement à ses clients. C’est aujourd’hui également le cas de la food « montre-moi ce que tu manges, je te dirais qui tu es et à quelle tribu tu appartiens ». Il est d’ailleurs intéressant d’observer lors d’études consommateurs que les profils qui se dessinent sont qualifiés autant par leur style vestimentaire, leurs univers déco, leurs loisirs, leurs média de prédilection que par ce qu’ils mangent.
Pour en découvrir plus je vous invite à contacter le Bureau Leherpeurparis qui réalise régulièrement des études prospectives multi-univers….
Cet engouement est une aubaine pour informer, transmettre tout en restant désirable !
Trouver son axe de différenciation en mode comme en alimentaire (notamment pour la bio), c’est partager ses valeurs, ses engagements qui intéressent le consommateur pour justifier un prix, un positionnement, un bénéfice et fidéliser.
Bon à savoir : Face à l’inflation les français cherche l’économie, cela passe bien-sûr par des achats à prix bas, mais ce n’est que le 3ème levier. En premier ils comptent réduire le gaspillage alimentaire (46% d’intention), puis privilégier le fait maison (43% d’intention). Une opportunité pour les marques et distributeurs alimentaires pour apporter des astuces et idées à leurs clients.
Enfin, il est essentiel de garder en tête que la notion de PLAISIR est centrale, s’affranchir des contraintes est un rêve qui atteint son apogée dans le Metavers : l’apparence n’est plus une contrainte, chacun peut se métamorphoser en ce qu’il veut : changer de genre, de morphologie, de couleur de peau, devenir un animal, un personnage fictif… on peut manger ce que l’on veut sans incidence santé, poids, etc. se libérer du goût, des textures, des allergies, intolérances ou pathologies….
Le Metavers : une opportunité de s’inventer une vie dans toutes ses dimensions sans culpabilité, 100% plaisir.
Pour commencer, n’oublions pas d’éviter toute culpabilisation, comme nous le rappelle Constance avec humour sur France Inter :