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Il fut une époque, pas si lointaine, où déjeuner (ou dîner) au restaurant était exceptionnel.
Y manger régulièrement était réservé à certaines professions : les VRP, qui bénéficiaient de formules dédiées (les fameuses soirées-étapes), les routiers qui eux, ont carrément rebaptisé une catégorie d’établissements, les hommes d’affaires, les millionnaires en goguette ou qui vivaient à l’hôtel à l’année. Monsieur et madame tout-le-monde n’allaient au restaurant que pour une demande en mariage, un déjeuner de communion, ou invités le dimanche par la grand-mère. On avait une chemise propre, une cravate et des souliers bien cirés ou une robe repassée au cordeau et un petit collier. On s’était rasé. Bref, on était sur son 31.
Trente ans plus, tard, aller au restaurant est devenu aussi banal que passer des vacances dans les Caraïbes. On se fait « un petit resto » entre copines, entre amis, en couple, sans occasion particulière, le mardi soir ou le samedi midi, juste pour le plaisir de sortir et avouons-le, de manger sans avoir à éplucher les légumes ni gratter les casseroles. C’est bien. C’est même très bien (et tant mieux pour les restaurateurs).
Le drame, c’est qu’on y va comme on est : que ceux qui s’habillent pour aller au resto lèvent la main. L’auteure de ce billet, la première, ne sort pas toujours ses escarpins et elle en a honte.
Car « s’habiller » un minimum, c’est-à-dire prendre le temps de se concocter une tenue plus soignée, participe au plaisir de la sortie, en la rendant extra-ordinaire au sens littéral. C’est se mettre dans un état d’esprit différent : le vêtement influe sur l’habitus, sur le comportement.
Mais surtout, « s’habiller », c’est une marque de respect pour les professionnels. Pour les serveurs, les cuisiniers et tous ceux qui travaillent à nous offrir une expérience client de qualité un moment agréable, en nous offrant un service et des plats soignés.
Et renversons les choses : en entrant dans un restaurant bistronomique ou étoilé, que pense-t-on d’un serveur en baskets ? D’une serveuse pas coiffée ? Imagine-t-on un chef en jogging et en tongs ? Alors, pourquoi leur infliger ce que nous n’apprécions pas ?
Stelda (qui file se mettre du mascara avant d’aller dîner)
Photo de couverture :
Halifax. Steep Lane Baptist Chapel buffet lunch. 1976. ©Martin Parr / Magnum Photos