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Au cours des derniers mois, notamment après le confinement, le débat sur l’agriculture et l’alimentation a mûri. Pour ceux qui ont suivi les éditions antérieures des forums Open Agrifood, certains sujets identifiés de longue date arrivent (enfin) dans l’espace public : les Français sont attachés à leur agriculture et sont préoccupés par l’indépendance alimentaire du pays comme par le risque d’une dualisation dans l’accès à l’alimentation. Ils revendiquent un modèle alimentaire fondé sur le bien-vivre et associant gastronomie, équilibre nutritionnel et accessibilité économique (égalité) avec simultanément le souci de la santé des consommateurs, des agriculteurs et de la planète.
Que ces éléments soient désormais centraux dans la façon d’aborder les enjeux agricoles et alimentaires ouvre beaucoup de perspectives. Pour autant, les problèmes urgents auxquels la filière fait face à très court terme rendent les mutations ambitieuses à la fois plus difficiles et plus nécessaires pour transformer un modèle agricole et alimentaire aujourd’hui en difficulté du fait de tendances largement contradictoires :
- Hausse des coûts de production et d’exploitation des entreprises ;
- Baisse du pouvoir d’achat des ménages français ;
- Exigence accrue pour la qualité sanitaire et nutritive des produits ;
- Attentes fortes sur la préservation de l’environnement.
La façon de consommer est un des leviers décisifs pour résoudre la crise actuelle. La solution ne va pourtant pas non plus d’elle-même parce que la distance augmente entre la société française et le monde agricole, notamment du fait d’une population de plus en plus exclusivement urbaine (et depuis plusieurs générations). En même temps, les Français sont pourtant de plus en plus sensibles au lien entre alimentation et santé, mais les citoyens ne sont pas tous égaux quant à l’accès aux informations. Ces tendances participent à la complexification des relations et des échanges entre le monde de l’agroalimentaire et la société française en général.
Au cours des débats citoyens conduits par l’Open Agrifood, la question de l’éducation à l’alimentation, de l’apprentissage des « bonnes habitudes » et des « bons réflexes » dès le plus jeune âge est apparue comme un levier décisif. Ce sujet est d’autant plus essentiel qu’il apparait que les plus jeunes connaissent peu ou mal les modes de production agricole.
Pour répondre à ces enjeux, l’école apparait comme l’espace de diffusion de ces connaissances, de rénovation du lien entre la société française et son agriculture et de réduction des inégalités alimentaires et donc sanitaires. C’est ce qui a conduit à la rédaction d’un manifeste à l’initiative d’Open Agrifood, auquel se sont joints le Think tank agroalimentaire, ACOFAL, Euro-toques et les Enfants Cuisinent et signé par plus de 1500 personnes dont des acteurs majeurs de la filière.
Au-delà du manifeste et grâce à celui-ci, l’enjeu pour l’Open Agrifood et ses partenaires est d’interpeler et mettre en mouvement l’ensemble des acteurs concernés par ce sujet, notamment politiques. À ce jour, le travail mené tend à montrer que la filière est partante, que les parents sont sensibilisés, que le corps enseignant est prêt et que les élus sont au fait de ces attentes.
Pourtant, rien ne bouge !
Il ne s’agit donc pas tant de convaincre du bienfondé rationnel de l’éducation à l’alimentation que de trouver les occasions pour faire avancer collectivement le sujet autour d’un moment fort de débat collectif .
Une des vertus des débats citoyens organisés par Open Agrifood est d’amorcer un espace politique qui fait la preuve aux décideurs que les sujets sur lesquels ils sont engagés ont un caractère très grand public. Ils permettent de mesurer, dans un espace ouvert, de la disponibilité des Français à avoir un échange nuancé et productif sur un débat parfois hostile qui draine des enjeux lourds et des postures dures.
C’est pourquoi l’Open Agrifood a pris la décision d’organiser un débat citoyen au moment du salon de l’agriculture, à Paris, en prenant à témoin de la maturité des attentes autour de ce sujet et de l’unanimité des parties prenantes, les ministres comme les responsables de la filière, qui auront été invités pour l’occasion.
Dans la lignée des premiers débats citoyens, il s’agira d’installer le débat aux conditions du plus grand nombre, mais aussi des premiers concernés : une enquête qualitative audiovisuelle auprès d’une quarantaine de jeunes issus de classes de CM1, CM2, 6e et 5e (entre 8 et 12 ans) permettra de les entendre sur leur vision de la cuisine, de l’alimentation et de la production agricole et de ce qu’il faudrait améliorer ou changer pour que les choses aillent dans le bon sens. L’enjeu est de comprendre la manière dont ils se saisissent et conçoivent la pratique de la cuisine dans la perspective des enjeux de production des produits.
Ce travail doit permettre d’établir et instruire les grands constats identifiés dans le manifeste (déconnexion de la société avec le monde agroalimentaire et importance de l’alimentation sur la santé) et de tracer les pistes susceptibles de rendre incontournable cette inscription dans les programmes scolaires. Le fait d’aller chercher les plus jeunes, qui sont les premiers concernés, doit permettre que le constat énoncé par l’Open Agrifood, dans son manifeste soit bien partagé par le public ciblé par la suite.
Si ce texte vous inspire, rendez-vous le 28 février à 18h dans le Hall 4. Venez partager vos convictions et écouter celles des autres !