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Il en va des émissions de cuisine comme des émissions de jardinage.
(Merci à Eric pour partager sur StripFood cette réflexion sur les dérives de la cuisine cathodique)
On parle beaucoup du cadre, on fait rêver (en insistant bien comme dans « Top Chef » sur le fameux: “ c’est mon rêve de cuisiner dans un palace comme celui-là ”)… mais où sont passé la passion, l’approximation qui font la touche personnelle, les caractères et même, le côté un peu dégueulasse ou “dans son jus” – pour rester urbain – ? Et puis, et surtout, où est passé le côté pratique ?!
Tendance « Overfood »
Il n’y a jamais eu tant d’engouement pour la gastronomie à la télévision et par conséquent d’émissions. Pour autant, jamais la cuisine n’a été aussi peu montrée, rendue accessible.
Petit Renaud a tiré sa révérence, et le vin blanc à 10 heures du mat’ avec lui. Robuchon avait également arrêté, un peu avant (lui était chiant, avec sa voix de crécelle). Sans évoquer Maïté et ses cascades d’Armagnac et de graisse de canard.
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Alors que nous reste-t-il sur la cuisine?
Les gens de la télé se rendent-ils compte qu’on ne sait plus faire d’entrées par exemple ? Que l’on masque cette lacune par des apéros à n’en plus finir où le radis noir le dispute à la carotte coupée en lamelles ?
Allez, il reste quand même Julie Andrieu et ses carnets. O.K., elle se met en scène avec sa Peugeot qui ne roule que 50km par an, ou par sa cuisine de banlieue ouest parisienne dans laquelle des chefs alsaciens viennent nous raconter une cuisine bretonne… Mais rendons-lui quand même grâce car on a droit à des perles et c’est bien ce que nous voulons voir en fait !
Des recettes personnelles faites à domicile, avec, très souvent, des recettes au doigt mouillé (dans la crème). Un gigot d’agneau de pré-salé à la broche, cuit dans la cheminée, dans le bocage de la Hague, des huîtres chaudes au pommeau du côté de Carteret… Et le tout dans des cuisines qui vivent, avec les cartes postales coincées sur le manteau de la cheminée, elle-même maculée de suie. Avec des gens qui sont tantôt très diserts, tantôt dans une économie de mots toute normande. Avec des gens dont on sent qu’il ont dit à la famille quelques jours avant le tournage “y a la télé qui vient”.
C’est ça, moi qui me fait rêver. Qui me donne envie de manger. C’est ce que je regarde quand je mange, et je parle de ce que je vois et de ce que je mange avec la personne avec laquelle je regarde et je mange. Je veux du pratique, “de l’atteignable”. Je n’ai ni l’envie d’attendre six mois pour m’assoir dans un étoilé – je n’y serais pas à l’aise, ce n’est pas mon monde -, ni les moyens.
La cuisine est un art de vivre pour vivre
Je veux du plaisir, trépigner à l’idée de cuisiner, m’appliquer à réaliser, ou déguster, et continuer à en parler des années. La cuisine est un art de vivre pour vivre, pas un art figé. À trop focaliser sur le contenant, la scénarisation, les émissions oublient un peu l’essentiel, l’imaginaire culinaire, et sa réalisation au quotidien.