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La végétalisation de nos assiettes est un enjeu sociétal majeur. En effet, consommer davantage de fruits et légumes tout comme rééquilibrer la part des protéines végétales vs les protéines animales est à la fois bon pour nous (notre santé et notre budget) et bon pour la planète. Alors, plutôt que de chercher à culpabiliser les mangeurs de viande (ce qui ne fonctionne absolument pas au passage), et si on leur donnait envie de faire évoluer leurs pratiques alimentaires en misant sur un végétal plus « sexy » ? Bref, on veut du P.O.S.I.T.I.F. C’est « Inspiration végétale », la nouvelle série de StripFood.
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1. Explorer de nouveaux moments de consommation
Repositionner les légumes sur des moments de consommation qui ont le vent en poupe comme l’apéritif ou le snacking est un levier de consommation qui fonctionne. Il s’agit par exemple de l’énorme succès des tomates cerises, des produits découpés, mais aussi des baby légumes comme ici avec la marque Florette ou la Ferme à Jules.
2. Repositionner le végétal au coeur de l’assiette
Le « Tout chou-fleur » et « le céleri rave de la tête au pied », deux créations de « Brut, maison de cuisine »
Quand le légume se rebelle de son simple statut d’accompagnement ! Chez « Brut, maison de cuisine », un restaurant situé Blois, Brut, on propose régulièrement à la carte un plat célébrant un légume sous toutes ses formes et cuisiné de multiples façons : braisé, en purée, grillé ou encore en sauce. Exit donc le légume comme simple accompagnement, le légume érigé en star est présenté comme un vrai plat principal. Trônant fièrement au milieu de l’assiette, sa présence et sa puissance pourraient laisser croire à un gros morceau de viande. On ressent la structure du légume et le jus corsé qui l’accompagne apporte définitivement la touche de gourmandise. Cette création végétale démontre le potentiel du légume et sa capacité à devenir l’espace d’un moment le roi de l’assiette.
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3. Jouer la carte des variétés et de la profondeur de gamme
Exit la tomate ronde de base, souvent fade et ennuyeuse, place aujourd’hui à une palette de variétés, de goûts et donc de nouvelles histoires pour susciter le désir et renouveler les plaisirs comme en témoigne le compte instagram @urbanfarmandkitchen. On peut également citer la belle gamme de jus de tomates de chez Alain Millat.
4. Susciter l’irrésistibilité
Donner envie de cuisiner le végétal, c’est tout un art. Mais pour convaincre le plus grand nombre, mieux vaut jouer la carte de l’émotion vs la raison. C’est le sens de cette création Instagram signée INTERFEL, le syndicat des fruits et légumes. Un bel exemple d’inspiration pour donner envie de cuisiner de façon simple, gourmande et créative.
5. Rendre la consommation plus pratique
Un des freins à la consommation de légumes ou certaines légumineuses est la praticité et en particulier aux modes de préparations. Dans une récente campagne d’affichage de Prince de Bretagne sur les artichauts, on rend hommage aux maraîchers (important mais peut être pas décisif pour déclencher l’acte d’achat) mais surtout on communique sur le fait que ce légume puisse se cuisiner en seulement 10 min au micro-ondes.
Autre exemple avec la marque de légumes secs, Vivien Paille. S’inspirant du marché du riz (dont les temps de cuisson réduits ont été entre autres décisifs pour développer la consommation) , elle mise sur des temps de préparation raccourcis (3 min pour les lentilles et 6 min pour le quinoa) obtenus naturellement avec des produits avec des peaux plus fines et même parfois sans peaux.
6. Jouer sur les « bons » mots
« Les temps changent. Autrefois, si vous disiez que vous étiez vegan, les gens pensaient que vous alliez taguer une boucherie » affirme Juliette Draux, une jeune pâtissière à Tours dans un dossier du journal The Guardian intitulé « Comment les chefs français vegan réinventent la pâtisserie française ». Parmi les clés de succès, l’usage des mots s’avère en effet particulièrement stratégique. Exit donc vegan, parlons plutôt de végétal.
Bien que vegan engagé, Rodolphe Landemaine a banni le mot vegan de sa boutique, préférant plutôt « végétal ». Il déclare : « Si les gens trouvent cela bon, c’est seulement après que l’on aborde les questions d’éthique ou d’environnement comme un peu la cerise sur le gâteau, car si ce n’est pas bon, les gens ne seront pas réceptifs à ces engagements » Rodolphe Landemaine dans « The Guardian » (Juillet 2022)
Pour aller encore plus loin, certains chefs ou marques inspirés davantage par la création que la copie misent également sur des noms des recettes originales créées ex nihilo dans la veine du fameux plat signature du grand Chef Michel Bras, le Gargouillou.
7. Promouvoir l’accessibilité prix
On ne peut pas parler d’accessibilité sans évoquer la notion de prix. Si ce n’est pas toujours simple d’arbitre entre le prix le plus bas et le plus juste, certaines enseignes comme dernièrement Intermarché se lance avec humour dans le combat pour des fruits et légumes plus accessibles.
C’est également le cas de l’enseigne Trader Joe aux USA qui réalise des mises en avant permanentes pour rendre son offre accessible.
Mise en avant chez Trader Joe aux USA
8. Jouer la carte de la ludicité
Evelyne Debourg, élue meilleure cantinière de France, a consigné dans son livre Fruits et légumes, 40 recettes pour les aimer toute l’année ses différentes astuces pour rendre les fruits et légumes sexy pour les enfants. Parmi ses « combines » fétiches : travailler les mini légumes ou bien aussi créer des assiettes originales en variant formes et couleurs pour surprendre les pupilles puis les papilles. Pas vraiment surprenant quand on pense au succès des tomates cerises chez les adultes.
Dans un autre registre, la nutritionniste Sophie Janvier nous propose dans son dernier ouvrage « La méthode douce pour mieux manger » une méthode facile et amusante pour manger plus sainement tout en se faisant plaisir. C’est la règle des trois couleurs dans l’assiette. Une façon de lutter de façon ludique, simple et esthétique contre la tentation de l’assiette jaune, composée uniquement de féculents, de pain ou encore de produits panés.
La nutritionniste Sophie Janvier s’attaque au syndrome de l’assiette jaune.
9. S’inspirer des cuisines du monde
Nous ne consommons clairement pas assez de légumes ni de légumineuses. Pourtant certaines cuisines du monde sont à ce titre fort inspirantes et de nombreux chefs, mais aussi marques l’ont bien compris. C’est par exemple le cas du dahl, une recette indienne à partir de légumineuses proposée ici par la marque Hari&Co ou la chaîne youtube Whoogy’s.
10. Jouer sur la mise en scène
Inspiré de la pâtisserie avec les fameux « gravity cake », le site « Je bosse en grande distribution » a repéré dans certains magasins des mises en scène étonnantes dans les rayons fruits et légumes.
11. Donner des idées simples pour un résultat bluffant
En la matière, sur TikTok mais aussi Instagram, le Chef Simon Auscher maitrise parfaitement le sujet. Il se définit « cuisinier artistique » et surtout « not a vegetarian / In love with veggies ». Ses créations sont toujours créatives, gourmandes et volontairement accessibles.
12. Jouer sur l’hybridation
Et si on ne devait pas choisir entre la version carnivore et végétarienne ? C’est le pari un peu osé que tente la jeune marque Bluff avec ces saucisses hybrides composées de 50% de viande et 50% de végétal destinée à séduire les flexitariens. Mention spéciale pour une production « made in Berry » (Vierzon) et une liste d’ingrédient ultra courte.
13. Miser sur l’humour
Polariser le débat entre vegan d’un côté et viandards de l’autre est non seulement ridicule, mais totalement contre-productif. Quittant le terrain des clichés et de la morale, certaines marques comme Burger King ou La Vie ont bien compris que jouer sur l’humour pouvait être un bon levier pour interpeller sans hystériser le débat. Et ça fait franchement du bien.
14. Bouger les représentations sociales
« Chaque jour, libérer votre imagination pour partager une source de plaisir sans limite ». C’est à partir de cette Raison d’Être que la nouvelle plateforme de communication « Jamais trop » de syndicat professionnel INTERFEL a été construite. L’enjeu ? Bousculer une image un peu trop sage des fruits et légumes pour faire évoluer les comportements de consommation de la jeune génération âgée de 25 à 34 ans et tenter d’associer à cette catégorie la notion de diversité et du plaisir illimité. Un ton qui prend le contrepied de certaines injonctions alimentaires en faisant la promotion de la diversité des fruits et légumes frais, miroir de notre société.
15. Prioriser les bénéfices individuels
Dans une récente interview pour StripFood, Sihem DEKHILI, Professeure en Marketing durable déclarait « Les entreprises qui mettent le focus sur les bénéfices altruistes font fausse route, car elles ne touchent qu’une niche ». En effet, afin de convaincre une cible plus large, nous devons prioriser les bénéfices individuels (santé, pouvoir d’achat) avant les bénéfices collectifs (la planète ou les animaux). C’est le sens de cette affiche INTERFEL qui associe la consommation de fruits et légumes de saison à un bénéfice individuel central, la question du pouvoir d’achat.
Et découvrez la suite de la série avec l’épisode #2 :
Crédit photo couverture : @urbanfarmandkitchen