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Et si l’on s’intéressait quelques instants aux principales recommandations misent en exergue par la Commission du Sénat, qui vient de rendre son travail concernant le surpoids et l’obésité en France* ? Une problématique d’actualité, si l’on considère que 30% de la population française est aujourd’hui en surcharge pondérale (et 17% en situation d’obésité). Et donc en situation de plus grande fragilité face aux risques sanitaires.
C’est alors que nous découvrons qu’il serait temps d’évaluer les liens entre la consommation d’aliments ultra-transformés et l’obésité (recommandation n°2 du Rapport ) pour tenter de juguler ce problème de société qui frappe la planète et n’épargne pas l’Hexagone. Voilà qui semble en effet judicieux, après 50 années d’incitation agro-alimentaire à consommer du facile et pratique, du “c’est déjà prêt/hâché/compoté”, ou bien du “à ingurgiter devant la télévision ou l’ordinateur pour ne plus perdre de temps” !
Le rapport paru le 29 juin dernier nous indique également qu’il serait souhaitable de confier à l’éducation nationale et notamment aux écoles primaires, la conception d’un module « obligatoire » ( obligatoire pour qui ? ) visant à former les enfants au goût et à la pratique de la cuisine ( Recommandation n°7 ). Sachant par ailleurs que les cantines de collèges sont pour l’immense majorité déplorables, puisque gérées par les départements dont la préoccupation première reste le coût des repas et non pas le bien-être alimentaire des élèves. Soulignons ici le contraste saisissant vécu d’ailleurs par certains écoliers, habitués à la qualité du cuisiné sur place de leurs cantines, lorsqu’ils arrivent en pleine pré-adolescence (moment clé pour le corps et l’esprit) au collège et découvrent le menu peu ragoûtant qui les attend, digne du pire restaurant Universitaire…Encore une belle occasion de les éloigner de l’acte de bien manger et de les jeter directement dans la gueule des fast-foods environnants…(cf plus bas dans ce texte l’allusion à la Recommandation 17)
Toujours dans le but de faire la preuve que nous sommes en 2022 et particulièrement éveillés s’agissant des questions relatives à la santé publique, on suggère d’interdire tous les dispositifs marketing ludiques visant à capter l’attention des enfants ( Recommandation n°9 ). Une idée plutôt brillante si l’on considère que la majorité des messages publicitaires qui harcèlent les plus jeunes depuis des décennies sont liés à la consommation de tout ce qui est « bon », comprenez tout ce qui est sucré, salé, gras, transportable, en format individuel plastifié, consommable avec les mains, etc. Quid d’une modification de la commercialisation de ces produits par ailleurs ? Nul ne le sait pour le moment, dans la mesure où la marge bénéficiaire réalisée sur la malbouffe reste des plus attrayantes.
La commission exprime également son souhait de voir évoluer l’algorithme et l’affichage du nutriscore pour mieux prendre en compte les aliments ultra-tranformés ( Recommandationn°10 ). Il va de soi que la population directement touchée par le surpoids et l’obésité est ultra attentive au marquage coefficienté des produits afin d’éviter les achats compulsifs et a comme priorité de s’engager consciemment sur la voie saine de la consommation juste et éclairée par la police des calories.
Dans un esprit visant à favoriser l’égalité culturelle et sociale, on propose par ailleurs d’expérimenter des chèques alimentaires ciblés sur les ménages les plus précaires ( Recommandation N°11 ). L’objectif étant certainement d’inciter les plus pauvres à manger des produits de qualité, d’où l’utilisation de l’expression « chèques ciblés » c’est-à-dire dont l’usage serait en parfaite contradiction avec la propagande publicitaire que nous subissons depuis des lustres pour leurs préférer des produits bios et locaux par le truchement d’une bonne volonté retrouvée.
Où l’on apprend également qu’il serait plus que temps de réglementer les teneurs en nutriments ( sucres ajoutés, acides gras saturés et sel ), sachant que pour l‘heure c’est encore l’ouest sauvage en matière de législation et qu’il est à peu près possible de faire n’importe quoi ou presque, comme ce fût le cas pendant des années dans les rayons yaourts et produits laitiers des DOM-TOM par exemple ( Recommandation n° 12 ).
De même, il devient urgent d’interdire les promotions commerciales en grande distribution sur les produits sucrés et salés car elles incitent à l’achat les plus influençables d’entre-nous. ( Recommandation N°13 ) Attention néanmoins à ne pas paniquer si vous avez l’habitude d’acheter les paquets d’Oréo par 3 en tête de gondole, car nous ne parlons que de recommandations contenues dans un rapport sénatorial qui risque de finir aux oubliettes de l’histoire malgré toute ma bonne volonté pour y faire écho via cet article…
Il en va de même pour la régulation des installations de fast-foods à proximité des écoles, collèges et lycées ( Recommandation N°17 ). Ne paniquez pas ! Il y a fort à parier que nos amis les jeunes pourront se précipiter dans leurs lieux de villégiature préférés pendant encore quelques saisons avant qu’une loi ne soit promulguée pour favoriser les saladeries bio (et un menu attractif dans leurs cantines) !
J’en termine avec la recommandation n°19 qui me tient particulièrement à cœur puisqu’elle convoque l’idée “d’activité physique et sportive”. Hélas, il n’est question que de se payer de mots en exprimant le désir de favoriser l’accès au sport sur tout le territoire. Pas un mot sur le fait de sensibiliser les enfants, les adolescents et les adultes aux bienfaits de la respiration et du mouvement intelligent. Pas une ligne sur le fait de proposer dès la maternelle une pédagogie centrée sur la corporéité, pour accompagner chaque enfant sur la voie de l’épanouissement psycho-corporel. Pas un paragraphe pour inciter les parents à pratiquer l’expression corporelle en famille ( activité gratuite au demeurant ! ) et qui procure de la joie tout en stimulant le cerveau mimétique de tous et de chacun.
Bref, vous l’aurez compris, en ma qualité de coach psycho-corporel et de consultant en stratégie, je reste sur ma faim à la lecture de ces recommandations et de ce rapport dans son entièreté. A mon sens, il est possible d’éveiller les personnes en misant sur leur intelligence et en commençant par le commencement : favoriser l’estime de soi dès le plus jeune âge, pour une relation à la nourriture apaisée, enthousiasmante, légère, en phase avec nos modes de vie.
*Rapport d’information de Mmes Chantal DESEYNE, Brigitte DEVÉSA et Michelle MEUNIER, fait au nom de la commission des affaires sociales n° 744 (2021-2022) – 29 juin 2022