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Faut-il vraiment écouter les consommateurs ?
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#1 Olivier Dauvers, journaliste et expert de la grande consommation
Non, d’évidence, il ne faut pas « écouter » le consommateur.
Pas tant par désintérêt (le client demeure bien la raison d’être de toute forme de production), mais bien par objectivité et, in fine, efficacité de l’étude. D’abord, les consommateurs savent-ils exactement ce qu’ils veulent, ce qu’ils désirent, ce dont ils pourraient avoir le besoin ? Partiellement seulement. L’exemple est certes éculé, mais l’invention du smartphone ne répond à aucune étude consommateurs. Personne (parmi les utilisateurs des débuts) n’avait verbalisé le besoin. Et encore moins défini ce que pourrait être / devrait être le produit. Un siècle plus tôt, aucun consommateur n’avait exprimé de l’intérêt pour un fromage fondu portionné… La Vache Qui Rit n’est rien d’autre que le fruit de l’intuition de Léon Bel. Et les exemples sont nombreux. Pour ne pas dire… infinis.
Au-delà, c’est l’intérêt même de l’écoute des consommateurs qui doit être questionnée, tant les biais sont avérés. Le consommateur répond-il à la question selon l’aboutissement d’une réflexion qui lui est propre ou selon une construction normée par ce qu’il pense être la « bonne réponse » ? Dit autrement : répond-il ce qu’il pense ou… ce qu’il pense devoir répondre ? La nuance est d’importance, car elle peut diriger les marques commanditaires (de l’étude) dans des directions totalement différentes des véritables attentes. Là aussi, les exemples sont nombreux du large écart entre l’intention (exprimée de manière déclarative) et l’action (les mains sur le chariot de supermarché).
Voilà pourquoi l’écoute des consommateurs est a minima dangereuse, au pire inutile. Ou alors périmétrée à des questionnements fermés et peu engageants : préférez-vous le pack bleu ou le pack rouge ? En revanche, l’observation du comportement est hautement indispensable. Observation en situation d’achats, observations via les achats (les sorties caisses), etc. : autant d’éléments qui traduisent un comportement et non une intention. Et qui sont de nature à nourrir la réflexion.