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Tous les sujets se plient à une caricature souvent excessive mais tellement pratique à ingurgiter dans un flot quotidien d’information à snacker.
Les médias l’ont bien compris. Pour faire vendre, il faut des titres accrocheurs (c’est pas faux !) mais qui frisent souvent avec la démagogie, voire la manipulation (c’est plus gênant !).
C’est la mode du « bashing » (dénigrement en français). Pour exister, enfonçons les autres et le plus violemment possible de préférence !
Et en matière de bashing, l’alimentation n’est pas en reste.
Agriculteurs pollueurs, industriels empoisonneurs, bobos idéalistes un peu cons cons, journalistes vendus, politiques véreux, blogueuses food vénales et vendues ou encore vegans terroristes… Nous vivons une époque qui ne fait pas franchement dans la dentelle.
À l’origine de ce bashing ? Plusieurs choses.
Les dérives d’un système agro-alimentaire
Les scandales alimentaires, les fraudes, le manque de transparence d’un système agro-alimentaire qui inquiète et une méfiance croissante sur la qualité des aliments engendrent clairement ce bashing envers le food et en expliquent concrètement les fondements.
La puissance des réseaux sociaux
Mais le bashing est devenu aujourd’hui puissant car tout le monde a concrètement la capacité avec les réseaux sociaux d’émettre un avis, initier une pétition ou encore appeler au boycott. Une part importante a même lieu sous couvert d’anonymat. Plutôt pratique !
Et puis ce bashing se nourrit souvent d’une vision fantasmée de la réalité nourrie de stéréotypes bien ancrés. Internet favorise clairement cela à travers les fakes news qui jouent sur ces peurs et les encouragent. Et puis il y a aussi le phénomène dit de « la chambre des échos ». Nous échangeons sur Internet le plus souvent à l’intérieur d’un cercle partageant les mêmes opinions encourageant ainsi le développement de ces informations caricaturales.
Une vision souvent manichéenne
Dans ce brouhaha médiatique, on affectionne particulièrement un registre : opposer les choses de façon souvent simpliste. En matière d’alimentation, on aime bien opposer les méchants dit les « gros » (dont on oublie qu’il s’agit souvent de petits — qu’il est cette fois de bon ton d’adorer — qui ont réussi) aux gentils « petits » (qui rêvent secrètement de devenir gros) avec une vision caricaturale et donc fausse de la réalité.
Vers un populisme alimentaire
À la fin, l’on pourrait même parler de « populisme alimentaire » nourrissant un peu plus chaque jour une vision décadente d’un système jugé à bout de souffle. C’est pas faux. Notre société doit se réinventer. Nous devons remettre à plat notre modèle alimentaire mais faisons-le au delà de postures qui nous enferment dans nos propres caricatures.
Et dans cette nécessaire transition alimentaire, n’oublions pas que nous avons besoin de tout le monde : les « petits » (start-up, artisans, néo-artisans, …) pour leur capacité à bouger vite et à apporter des solutions nouvelles et différentes, mais aussi les « gros » (industriels) pour leur capacité à faire bouger les choses de façon massive.
Il faut en rire mais en prenant du recul
Dans ce bashing ambiant, un média s’en paye particulièrement une belle tranche, c’est Charlie Hebdo !
L’hebdo qui se permet de rire de tout (et c’est tant mieux) dézingue le monde de l’agro-alimentaire dans son dernier dossier consacré au SIAL (le salon mondial de l’alimentation). Il campe dans une double page, une vision aiguisée d’un système qu’il pourfend. Et tout le monde en prend pour son grade : les gros industriels, les start-up de la foodtech mais aussi les vegans !
Il faut bien sûr en rire (ça pique mais c’est capital), mais avec ce recul nécessaire pour capter une vérité souvent bien éloignée des simples clichés médiatiques. Et ne pas céder soi-même à la tentation de radicaliser sa pensée. Ce serait si simple…
La solution ? Le défi de la transparence et de la pédagogie
Une bonne partie de la solution réside dans une nécessaire transparence et bon nombre d’acteurs l’ont déjà compris. Des industriels comme Fleury Michon ont ainsi initié ce mouvement avec la campagne #venezvérifier qui convie journalistes et consommateurs à suivre la chaîne de production du surimi.
La marque C’est qui le Patron ? permet à ses sociétaires de vérifier eux-mêmes la bonne application du cahier des charges qu’ils ont voté.
Du côté des agriculteurs, la riposte s’organise aussi avec un réseau puissant de néo-communicants sur les réseaux sociaux comme par exemple la chaîne Youtube d’Étienne F. Ces agriculteurs orchestrent eux-mêmes la transparence de leurs activité, bien loin souvent des clichés véhiculés.
En fin de comptes, nous devons nous reconnecter avec notre alimentation et en particulier le monde agricole avec qui nous avons perdu petit à petit la connexion.
N’oublions pas qu’une bonne partie de la confiance réside dans la connaissance et donc la transparence.
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