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Dans cette nouvelle série « 5 questions pour nourrir l’avenir », je reçois des personnalités qui nous partagent leur vision dans des entretiens à la fois courts et éclairants.
Noël Zierski a été le premier directeur marketing de l’enseigne Leclerc avant de devenir DG d’Intermarché, puis de bifurquer vers la banque chez BNP Paribas. Aujourd’hui sparing-partner de dirigeants, il nous partage à travers cette interview une vision à la fois lucide et optimiste de notre société. Grâce à un accès à une information claire, une coopération renforcée entre les parties-prenantes, et le rôle d’aiguillon de notre jeunesse, il est possible d’inventer un avenir plus résilient.
Quel regard portes-tu sur le monde d’aujourd’hui ?
Nous sommes à la croisée des chemins, face à de multiples transitions (écologique, énergétique, alimentaire…). Si elles ne sont pas opérées volontairement et intelligemment, elles s’imposeront alors violemment à nous. Le concept de « solastalgie » (terme inventé par le philosophe australien Glenn Albrecht) décrit bien la douleur et l’impuissance collective face à la dégradation environnementale. Un changement de paradigme est impératif pour ne pas reproduire un modèle à bout de souffle. Et ça ne passera surtout pas par des solutions qui existent déjà, mais des solutions nouvelles.
Quel est, selon toi, l’enjeu des enjeux en matière d’agriculture et d’alimentation ?
Nous devons repartir de la base du système et sécuriser en priorité les agriculteurs en leur assurant un revenu digne de leur travail. Sans eux, pas d’agriculture, donc pas d’alimentation. Une étude (« La Grande Consultation des Agriculteurs », The Shift Project, 2024) récente montre que 93% des agriculteurs sont prêts à changer leurs pratiques, à condition que cela soit économiquement viable pour eux. C’est la base.
Peux-tu nous partager un signal faible (signe avant-coureur de changements majeurs potentiel) porteur d’avenir ?
La Covid-19 nous a rappelé l’importance de la santé et a aussi dévoilé les failles de notre souveraineté (alimentaire, industrielle, énergétique). C’est un signal faible qui est fort ! Je citerai aussi les jeunes générations qui incarnent l’espoir avec leur volonté de consommer différemment (seconde main, pragmatisme envers le monde du travail…). Elles seront assurément l’aiguillon du changement.
Quel est le levier le plus efficace pour faire évoluer nos comportements de consommateur ?
Une prise de conscience collective me semble nécessaire, car nous sommes ce que nous mangeons. Pour espérer faire évoluer les comportements, les consommateurs doivent avoir accès à des données claires et compréhensibles pour adapter leurs choix en connaissance de causes et en conscience. Les médias, tout comme l’école et les différents acteurs du monde agricole et alimentaire ont une responsabilité majeure en ce sens. Mais c’est aussi notre responsabilité de consommateur de prendre le temps de nous y intéresser. En fait, c’est toute une éducation à repenser.
Quelle tendance a, selon toi, le plus d’avenir ?
Plusieurs tendances sont porteuses, comme la simplicité ou encore la sobriété. Si il faut faire un choix, je dirai la solidarité et la coopération. L’histoire humaine prouve que nous surmontons les crises en collaborant.
1 Marque ou 1 entreprise qui change la donne ?
C’est qui le patron ? et Bleu Banc Cœur pour leurs engagements envers le revenu des agriculteurs et la qualité de notre alimentation.
1 Innovation particulièrement remarquable ?
La technologie HPP (High Pressure Process) pour des aliments plus sains, sans conservateurs, tout en préservant leurs qualités nutritionnelles et gustatives.
1 Personnalité particulièrement inspirante ?
Jane Goodall (éthologue et anthropologue britannique, ndlr), une dame qui va avoir 91 ans et qui a étudié les chimpanzés dans les années 60. Véritable militante, elle nous fait comprendre que nous sommes un seul et même écosystème avec la planète, les animaux et les hommes.